Cet homme, oui, cet homme est mort.
J’aimerais vous le conter.
Il y a quelques temps, à Dakar, un corps, encerclé par les ténèbres, cherchait l’étincelle qui le mène à la lumière.
Celle d’un peuple assoiffé, affamé, qui cherchait la dignité et la souveraineté.
Un peuple jeune, bouillonnant, revêche, prêt à tout, jusqu’au sacrifice, pour se libérer.
A Dakar, un monde inquiet les contemplait. Terrés en leurs privilèges, les aînés se taisaient. La nuit galopait, un peuple cherchait son homme, et un homme cherchait l’étincelle qui le mène à leur lumière.
L’étincelle, c’était cet homme.
Cheikh Koureyssi Ba était cet homme.
Le plus grand avocat du Sénégal, m’avait dit Kemi Seba, quand il me l’avait présenté, quelques années auparavant, alors que, de persécution en persécution, nous le défendions.
Le plus grand avocat du Sénégal, qui, quand les choses se sont corsées, a soufflé mon nom à un homme, qui d’étincelle en étincelle, cherchait la lumière.
C’est parfois, aussi simple que cela.
D’une rencontre, l’autre.
D’une lutte, l’autre.
Et au bout du chemin, le destin.
Le mien. Le sien. Le nôtre.
Celui d’un peuple, qu’il m’a fait rencontrer, et d’une robe, qui l’a recouvert, tentant de le protéger des balles qui sur lui pleuvaient.
Une rencontre et une amitié, dans la dignité et la beauté.
Cet homme, qui a fait nos vies, est mort.
Je n’ai pu lui dire au revoir.
A son retour, dimanche, à Dakar, je lui souhaite l’accueil et l’accompagnement qui n’auraient jamais dû lui manquer.
Cet homme était un héros, aurait dû être décoré, ne l’a pas été, et j’appelle la jeunesse de son pays à l’accueillir et l’accompagner, jusqu’aux mondes où il nous attendra pour qu’on puisse, enfin, l’honorer.
Cheikh Koureyssi Ba, tu as été le plus grand d’entre nous, et tu le resteras.
Nous t’aimons, et t’aimerons.
JB