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Société

« Nous nous acheminons vers la fabrication de la première constellation de satellites »

Promouvoir la science pour mieux relever les défis du développement. C’est la conviction de Maram Kaïré. Dans cet entretien, le directeur général de l’Agence sénégalaise d’études spatiales explique les enjeux et opportunités des sciences spatiales. Il estime que le Sénégal a une position de leader à conforter grâce à des initiatives prometteuses.

En tant que militant des sciences pensez-vous que le Sénégal ait vraiment pris la pleine mesure du potentiel des sciences spatiales ?

Oui, parce qu’il y a des actes forts qui ont été posés. Ces dernières années, nous avons déjà eu la création de l’Agence sénégalaise d’études spatiales qui est la 22e agence créée sur le continent africain. C’est une course actuellement vers l’espace et beaucoup de pays africains sont en train de faire des efforts pour créer leur agence spatiale. Donc quand le Sénégal décide de créer cette agence spatiale, c’est qu’il y a une prise de conscience. Le Sénégal a fait les efforts nécessaires aussi pour lancer son premier satellite. Cela veut dire également qu’on a compris l’importance de l’utilisation des services qui proviennent de l’espace. Et au-delà de ça, il y a beaucoup de projets qui sont en gestation pour pouvoir développer le secteur spatial à travers son écosystème. Les entreprises sont en train de se mettre en place avec des startups qui s’y intéressent de plus en plus.

Justement, quel peut être l’apport des sciences spatiales pour l’économie sénégalaise ?

Aujourd’hui, ce qu’il faut comprendre, c’est que les feuilles de route que nous avons au niveau national viennent s’adosser de façon directe ou indirecte à l’agenda 2063 de l’Union africaine qui vise à développer de façon uniforme le continent africain. Lequel agenda s’articule autour des 17 objectifs de développement durable que le monde se partage à travers les Nations unies. Et ces Odd mettent la priorité sur la santé, l’éducation, l’éradication de la faim, la sécurité…Et tous ces aspects sont aujourd’hui adossés au secteur spatial.
Quand vous regardez les indicateurs qui montrent l’état d’avancement des pays qui font cette course pour l’atteinte des Odd, on se rend compte en fait que pour ces 15-20 dernières années, c’est les pays qui ont misé sur le spatial qui sont en avance dans l’atteinte de ces objectifs.

Concrètement c’est à quel niveau ?

Si vous prenez aujourd’hui un pays comme le Sénégal où nous allons mettre l’accent sur l’éducation, le spatial apporte des réponses concrètes par rapport au développement de solutions d’enseignement à distance. Sur la santé qui est un élément fondamental, si la population n’est pas en bonne santé, elle ne peut pas être productive. Elle peut bénéficier des meilleures solutions en termes de télémédecine qui permettront, demain, quelle que soit la position géographique du citoyen, de pouvoir bénéficier de l’expertise d’un médecin, qu’il soit au Sénégal ou à l’international.
Sur la partie agriculture, aujourd’hui, un pays qui vise la souveraineté doit régler la question de l’autosuffisance alimentaire. Ce sont les rendements, la productivité. Actuellement, les solutions qui sont à bord des satellites permettent de pouvoir prédire les rendements avant même qu’on arrive à la période de récolte. Donc, ça nous permet d’avoir une planification et une gestion de la productivité agricole. Mais d’anticiper également sur des fléaux. Il y a des technologies spatiales qui permettent de suivre, à distance, les menaces des sauterelles ou de criquets et de pouvoir anticiper avec l’Intelligence Artificielle. Aujourd’hui, avec les satellites, on peut même détecter des maladies sur les plantes avant que la période de récolte n’arrive. En faisant de la spectrographie, on envoie un rayon qui va réfléchir sur des feuilles des plantes et le signal qui est renvoyé nous permet de savoir si telle partie est affectée par telle maladie.

Sur le plan sécuritaire, quel peut être l’apport d’un satellite pour le Sénégal?

Sur la question de la sécurité, si vous voulez éduquer, vous voulez soigner, vous voulez travailler, vous voulez produire et que votre région n’est pas sécurisée, ce sera très difficile. Aujourd’hui, nous sommes dans une zone géopolitique qui est assez menacée par l’avancée du terrorisme en Afrique de l’Ouest. Le Sénégal, ayant une frontière qui est complètement couverte par le fleuve Sénégal, il est très difficile d’être présent physiquement partout. L’autre partie de la frontière, c’est l’océan Atlantique. Donc, 700 kilomètres de côte à surveiller également. La meilleure façon d’être très présent sur ces frontières, c’est de se mettre en hauteur. Et ça, ce sont les satellites qui fournissent la meilleure solution de pouvoir voir ce qui se passe à des faibles résolutions. Aujourd’hui, nous travaillons sur des projets de constellation de satellites qui vont être de l’ordre de moins d’un mètre de résolution. Et ça permettra de détecter des mouvements de troupes, de pouvoir détecter des intrusions de véhicules ou autres et de pouvoir intervenir très rapidement si ces menaces devaient se présenter. Sur la partie de la sécurité maritime, également la lutte contre le trafic illégal, la lutte contre la pêche illégale, mais aussi la lutte contre tout aspect d’immigration clandestine ou autre, des bateaux qui sortent avec 200, 300 personnes qui sont parfois condamnées parce qu’il y a des risques de chavirement ou autre, il est possible de pouvoir les détecter, d’intercepter et de prendre les mesures de sécurité nécessaires. Et pour finir, la sécurisation de nos plateformes de pétrole et de gaz. On n’est jamais à l’abri de fuite, on n’est jamais à l’abri, que ce soit dans le cadre du transport même du produit, on n’est jamais à l’abri de fuite ou de la sécurisation du périmètre même des plateformes. Le satellite nous permet, en passant de façon régulière, de pouvoir avoir un système d’alerte précoce et donner les informations nécessaires aux autorités rapidement.

En termes d’infrastructures satellitaires, où en est le Sénégal?

Aujourd’hui, le premier satellite a été lancé. Nous nous acheminons vers la fabrication de la première constellation. Donc ça, c’est un grand pas qui est prévu. Une constellation, c’est un groupe de satellites qui va être un réseau, qui va travailler ensemble. Quand vous avez une surface à couvrir comme le Sénégal, un satellite va passer une fois dans la journée et faire le tour de la Terre avant de revenir. Par contre, quand vous avez sept satellites qui sont un réseau, qui travaillent ensemble, un satellite va passer et moins d’une heure de temps après, un deuxième satellite va passer, ainsi de suite, jusqu’à ce que les sept satellites que nous avons prévus puissent faire le survol pendant la journée. Donc ça nous permet d’avoir des informations qui sont rafraîchies quasiment en l’espace d’une heure de temps ou parfois même de 30 minutes. Les deux premiers satellites doivent être construits à partir de cette année. Egalement nous espérons très rapidement commencer au niveau de l’Agence spatiale le projet que nous avons, de mettre en place le centre d’assemblage, d’intégration et de test de micro-satellites. C’est extrêmement important.

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